lundi 23 septembre 2019

Karin Boye - Kallocaïne

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Karin Boye 

Kallocaïne 

Ed. Hélios 


Daté de 1940 et généralement considéré comme l'un des quatre textes fondateurs de la dystopie moderne aux côtés de Nous autres, Le meilleur des mondes et 1984, Kallocaïne en est assurément le plus confidentiel - le moins connu, si vous préférez. Publié huit ans avant le roman d'Orwell mais traduit en anglais en 1966, il est peu probable que l'auteur britannique en ait eu connaissance avant de rédiger son livre. C'est de toute manière certainement avec le texte de Zamiatine que celui de Boye partage le plus de points communs. À ce sujet, la post-face de Léo Dhayer, qui signe également la traduction de la présente édition, offre de précieuses informations.

Ce classique de la littérature suédoise et du roman d'anticipation nous ouvre les pages du journal de Leo Kall, chimiste de son état et inventeur d'un sérum de vérité révolutionnaire. Grâce à son produit, l'État mondial, qui surveille déjà scrupuleusement chaque citoyen, n'ignore plus rien de ce que chacun pense. Que ce soit un besoin de rendre absolu le contrôle des individus, de graver son nom dans l'Histoire des sciences ou simplement de percer les secrets de sa femme, Leo Kall a tout le loisir de réfléchir à ses motivations, car c'est depuis la prison dans laquelle il croupit qu'il rédige son journal.

Le discours du roman est évident, la société oppressante est clairement illustrée et le livre dénonce sans aucun doute l’assujettissement et le totalitarisme. Pour autant, j'ai plutôt choisi d'en retenir le moyen que la fin. Pour servir son propos, Karin Boye imagine qu'une frange de la population, le "Service des sacrifices volontaires", met son corps et son esprit entre les mains des scientifiques pour la bonne avancée de leurs expériences extravagantes. Alors, soumis au sérum, ces hommes et ces femmes, qui n'ont finalement rien de plus à se reprocher que d'être des victimes consentantes, se lancent dans de longs monologues très révélateurs de la société. Entre les cobayes, le chimiste qui met à l'épreuve son épouse qu'il soupçonne d'adultère et les individus qui doivent rapporter le comportement de leurs conjoints aux autorités, Kallocaïne me semble autant être un roman pamphlétaire sur la liberté qu'une réflexion sur la vie en collectivité. Et s'il dénonce le pouvoir de la société sur les citoyens, il invite également à s'interroger sur la confiance que les individus peuvent ou non avoir les uns en les autres.

La réputation de Kallocaïne est amplement méritée. Formellement assez classique, il aborde un sujet grave et le traite avec un sérieux subtilement teinté de cynisme. Presque 80 ans après sa parution, sa lecture est toujours d'actualité, d'autant plus qu'en sous-titrant son livre "roman du XXIème siècle", son auteur devait se douter, au regard des évènements de son époque, que rien ne s'arrangerait de son temps.

2 commentaires:

  1. Ce roman, malgré mon envie de le lire, n'est jamais apparu sur les étagères numériques de ma médiathèque. Mais cela fait quelques temps que je n'ai pas vérifié.
    [temps qui passe]
    Et toujours pas...

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    1. Il aparaîtra ! C'est mon petit doigt qui me le dit !

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