David Grann
Les naufragés du Wager
Ed. du Sous-Sol
Le Wager. Après avoir voyagé quelques années pour le compte de la Compagnie des Indes Orientales, ce navire de sixième rang à gréement carré et doté de 28 canons entre au service de la Royal Navy. Nous sommes alors en 1739. Il lui reste deux ans avant de faire le naufrage qui le rendra célèbre et fera entrer son équipage dans la postérité.
David Grann propose de nous faire un récit de ce naufrage. Un récit ? Pas le récit ? Non, un récit. Car c'est bien de cela qu'il s'agit - en partie, du moins. Les naufragés du Wager, qui est pourtant l'histoire passionnante de ce drame, est moins un document sur la fin du navire et le destin de ses passagers qu'une réflexion toute en subtilité sur les multiples facettes d'une réalité et sur les différentes narrations possibles d'un unique évènement.
Après avoir exposé le contexte historique et les circonstances dans lesquelles le Wager prend la mer pour aller affronter l'ennemi espagnol, l'auteur présente les hommes à son bord : le capitaine Cheap, l'officier Byron, le canonnier Bulkeley, personnages principaux d'un équipage d'environ 300 marins. Au large du Cap Horn, la tempête fait rage et le Wager est séparé du reste de son escadre. Le temps est mauvais, la navigation est difficile, de nombreux hommes sont malades, certains du scorbut et d'autres du typhus. C'est dans ces conditions que le navire, égaré et démuni dans les intempéries, s'échoue près des côtes de la Patagonie.
Les survivants trouvent refuge sur la terre ferme mais ignorent alors qu'une nouvelle épreuve les attend. Tiraillés par le froid, la famine et le désespoir, les hommes ne tardent pas à se diviser en deux clans. D'un côté, les rares fidèles à leur capitaine ; de l'autre, les dissidents menés par le canonnier. Le temps va passer, beaucoup de temps et, finalement, cinq ans plus tard, après d'incroyables épreuves et de nombreux décès, quelques membres du clan Bulkeley parviennent à regagner l'Angleterre où ils font le récit de leur mésaventure, omettant bien entendu la mutinerie dont ils ont été les acteurs, les atrocités qu'ils ont commises. Mais quand, quelques mois plus tard, une poignée de rescapés du groupe de Cheap arrive à son tour et présente une version très différente des évènements, une cour martiale se réunit et cherche à démêler le vrai du faux.
Le livre, qui était captivant jusqu'alors et qui offrait un parfait équilibre entre une certaine distance documentaire et l'immersion d'une narration vivante, propose maintenant une réflexion fascinante sur les écarts du discours. Bien entendu, l'auteur, qui a conscience d'apporter lui-même une nouvelle version du drame sans avoir la garantie qu'elle soit parfaitement authentique, bien que basée sur de nombreux documents et une bibliographie fournie, ne s'autorise aucun jugement et va jusqu'à considérer les motivations d'un récit orienté ou d'une vérité relative. Il nous rappelle par la même occasion que, parfois, la fiction ferait presque pâle figure face à la réalité. Si tant est encore que l'on sache quelle est sa part de réel.
A lire tous ces avis dithyrambiques, je trépigne !! J'avais adoré La note américaine de cet auteur, et ce dernier titre a l'air tout aussi excellent. Et si tu le permets, je récupère ton lien pour l'ajouter au récapitulatif de "Lire (sur) les minorités ethniques", ce roman s'inscrivant dans le cadre de l'activité (https://bookin-ingannmic.blogspot.com/2021/12/lire-sur-les-minorites-ethniques-le.html).
RépondreSupprimerAlors arrête de trépigner et saute le pas !
Supprimer(Pas de problème pour le lien, bien entendu)