Jean-Gaston Vandel
Les Chevaliers de l'Espace (la trilogie)
Ed. Fleuve Noir
Quand deux écrivains belges décident d'écrire une série à quatre mains, ils fusionnent leurs deux prénoms en un, se bricolent un patronyme et imaginent une intrigue d'anticipation qui mêle leur idéologie un peu naïve de pacifisme et d'anti-militarisme. Ainsi, dans le futur, trois grands Empires se partagent équitablement la Terre...
1 - Les Chevaliers de l'Espace
Trois grands Empires se partagent donc équitablement la Terre. Mais, comme on le découvre dès les premières pages du roman, l'Empire Asiatique fulmine et n'entend plus se contenter de son tiers. Ses dirigeants estiment que "la race jaune doit gouverner !" Alors ils décident, de manière un peu radicale sans doute, de prendre les choses en main et d'éradiquer de la carte quelques grandes capitales européennes, ni plus ni moins. C'est un avertissement comme un autre.
Depuis l'ultimatum asiatique, la planète vit dans l'angoisse. Or, inexplicablement, tous les missiles ratent leurs cibles et s'abîment en mer sans même avoir explosé. Défaillance technique, erreur humaine, sabotage, mutation du magnétisme terrestre, aberrations météorologiques ? Toutes les hypothèses sont étudiées jusqu'au jour où cette interférence est revendiquée par les Chevaliers de l'Espace, des gardiens de la paix spatiale, tout de blanc vêtus, qui imposent à chacun de vivre dans l'harmonie, la compréhension et l'acceptation, sans quoi ils prendront les mesures qui s'imposent...
Les deux personnages principaux, Fédor Obienko, capitaine dans l'armée Jaune, et sa fiancé, Kate Lincoln, une belle américaine, jeune et élancée, vivent ces évènement chacun d'un côté de l'océan, inquiets l'un pour l'autre. Pendant ce temps, les Chevaliers, qui semblent dotés d'une puissance inouïe et d'une technologie de pointe mais qui demeurent difficiles à comprendre (n'oublions pas que "la seule chose au monde qui fût plus énigmatique qu'un Chevalier de l'Espace, c'était la Femme"), tentent d'apaiser les craintes légitimes des terriens à coups de mystérieuses déclarations laconiques :
"L'arbre sera jugé sur ses fruits..."
2 - Le Satellite Artificiel
Sept ans ont passé depuis les évènements du premier volume. La paix est parfaite, les organisations militaires dans les trois Empires qui se partageaient la Terre ont été supprimées et, alors que Kate Lincoln est évidemment devenue femme au foyer, Fédor Obienko remplit les fonctions de surveillant technique de
toutes les Centrales de Communication Radio de l'Asie Méridionale. Il a d'ailleurs prêté serment de toujours mettre la Paix Mondiale au-dessus de tout, même des intérêts de sa propre patrie, et de se sacrifier pour cette noble cause s'il le fallait !
La vie a repris son cours, jusqu'au jour où on annonce dans le journal imprimé à domicile - qui a supplanté l'ancien système de journal télévisé - que trois paquebots aériens de la même ligne sont tombés les uns après les autres, sans raison apparente, et cela à quinze jours de distance. Voilà qui est d'autant plus inquiétant que nul accident ne s'est produit depuis sept ans. Plus inquiétant encore, c'est maintenant Paxopolis, la Cité Aérienne depuis laquelle les Chevaliers de l'Espace observent la Terre et en contrôlent la paix et la bonne marche, qui commence à perdre de l'altitude...
La revendication ne tarde pas :
"Demain commence un nouveau chapitre de l'Histoire du Monde : l'âge glorieux de l'Islam s'ouvre. Notre mission va s'accomplir selon la volonté du Prophète. L'ordre musulman va régner désormais sur la Terre."
3 - Les Astres Morts
Alors que cet opus s'ouvre sur une présentation des protagonistes et rappelle dès les premières pages qu'il est préférable d'avoir lu les deux premiers volumes avant de s'y lancer, j'ai passé presque tout le roman à essayer de rattacher ce wagon aux précédents. Le temps que j'y parvienne, le train était passé, emportant avec lui les nombreux éléments qui font que cette intrigue est trop alambiquée et dispersée pour bien fonctionner. Paradoxalement, ces éléments en font sans doute le "meilleur" volume de la trilogie.
Kate et Fédor semblent relégués au second plan, remplacés par de nouveaux venus parachutés dans une suite qui n'en est pas totalement une. Les Chevaliers de l'Espace n'ont plus le beau rôle, il faut même, au cas où on aurait oublié de qui il s'agit, refaire la présentation de cette autorité "grande, souveraine et juste", capable de "bouleverser les conceptions les mieux établies et de se révéler d'une incomparable utilité." À la place, loin des problématiques des premiers volumes, l'intrigue s'ouvre sur des expériences de téléportation et introduit des personnages dotés d'une double vision. Mais à peine abordée la piste de réflexion sur les risques liés aux avancées scientifiques, le roman s'oriente vers une histoire d'invasion extraterrestre. Horreur ! Des créatures venues d'un autre monde "ont délibérément, mathématiquement, dirigé la comète sur la Lune pour que celle-ci, à son tour, percute la Terre" !
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Que retenir de cette trilogie ? Sans aucun doute sa grande naïveté. Les romans dégoulinent de candeur et de bienveillance, jusqu'à une chute digne des "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants" des contes de notre enfance. La conclusion tant attendue après trois volumes d'une égale niaiserie, peu convaincants mais malgré tout assez captivants et pas trop mal construits, est une apothéose ! Allez, inutile de vous faire languir plus longtemps, je vous sers sur un plateau l'ultime phrase du cycle et je laisse ainsi aux auteurs le mot de la fin :
"Et l'Histoire nous enseigne que, depuis lors, plus aucun évènement n'est venu troubler le développement de l'Humanité."
Et pour faire le point sur ce challenge, c'est ici.
Une petite pépite, visiblement!
RépondreSupprimerUne pépite, en effet. Cette collection en est décidément un filon inépuisable.
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