dimanche 19 avril 2020

Mary Doria Russell - Le Moineau de Dieu

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Mary Doria Russell 

Le Moineau de Dieu 

Ed. ActuSF 


Quand un signal est capté en provenance de l'espace, les autorités internationales se perdent en conjecture. Elles se dispersent en réunions stériles, retournent la situation dans tous les sens et, alors qu'elles s'abstiennent de prendre des décisions, La Compagnie de Jésus, elle, se contente de deux simples questions : qui envoyer et quand partir. Bientôt, leur expédition est en route. Mais quand, des années plus tard, un seul survivant revient, en piteux état qui plus est, une nouvelle question se pose : que s'est-il passé ? Mystère...

Mais, à mon sens, le vrai mystère réside ailleurs. Un mystère plus épais encore : comment un roman peut-il réunir des qualités si magistrales et des défauts si colossaux ? Car ce livre renferme du bon et du moins bon - j'ai failli dire du pire. Les qualités sont évidents, les défauts plus encore. Commençons par ces derniers.

Déjà, la langue. Peu élaborée et souffrant du syndrome du ni-bien-ni-mal-écrit, elle use régulièrement de comparaisons imagées, certes éloquentes, mais dont l'absence de finesse m'a fait hausser les sourcils à plusieurs reprises.
"Cette idée l'avait presque autant éberlué que de découvrir que les filles avaient elles aussi du poil au cul." (page 30, Pocket 2019)
Le roman est parsemé d'images de cet acabit. Traitez-moi de prude si vous voulez mais je reste convaincu qu'on peut faire aussi parlant tout en étant un peu plus subtil. De même, certaines références hasardeuses, pour ne pas dire douteuses ou aberrantes m'ont choqué. Ainsi, quand, pour se motiver dans son travail, le personnage se rappelle "sévèrement" que "arbeit macht frei" (page 196, Pocket 2019), excusez-moi de tiquer.

Quant à la narration, elle est laborieuse, composée de scènes molles et interminables qui, sous prétexte de dessiner les personages et de dresser leur profil psychologique, embourbent totalement le récit. Le récit, tiens, parlons-en. Il alterne sur des centaines de pages deux époques mal calibrées - le passé au début du vingtième siècle avec la préparation au voyage et le présent des années plus tard avec le retour du rescapé - et expédie la chute en quelques pages finales malingres que seuls les plus courageux ou obstinés atteindront.

Et les qualités alors ? Elles sont plus abstraites et tiennent principalement dans la réflexion proposée sur la foi et dans le travail introspectif auquel elles invitent sur notre rapport à la religion. Inutile d'être croyant pour saisir la portée des interrogations soulevées sur la place des croyances dans la société et dans notre Histoire. D'ailleurs, en traçant un parallèle entre l'arrivée des premiers missionnaires en Amérique et les conquérants de l'espace, le roman n'est ni plus ni moins qu'une allégorie sur la propagation de la "bonne parole".

Bref, je referme ce roman avec une moue plus que dubitative et un profond sentiment d'incompréhension face à sa réputation de chef d'oeuvre. Car, pour moi, si ses qualités sont réelles, ses défauts sont éliminatoires. C'est dit !

D'autres avis ? Hop ! BlackWolf, Xapur, Yogo, Le Chien Critique, Vert...

#DéfiCortex

Et pour faire le point sur ces challenges, c'est ici.

12 commentaires:

  1. Je n'avais pas été convaincu non plus par ce "chef d'oeuvre" beaucoup trop long et religieux à mon goût. Le manque de finesse ne m'a pas dérangé, j'aime bien un peu de légèreté parfois !
    Quand au "arbeit macht frei", religieux et nazi, le front est bas...

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    1. C'est marrant, moi c'est précisément son aspect religieux que j'ai préféré !

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    2. Comme le toutou, pas mieux, pareil... ennuyant au possible et beaucoup trop long !

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    3. Ah oui, "ennuyeux", voilà ce que j'ai oublié de caser dans ce billet. Merci !

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  2. J'avais bien aimé pour ma part. Pas un chef d'oeuvre et de grosses facilités parfois mais l'ensemble est fort intéressant.

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    1. Il y a effectivement des choses intéressantes mais noyées dans une masse fastidieuse.

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  3. Je n'étais de base pas du tout tenté, Vert m'avait laissé un peu de doute en parlant de Le Guin, mais là non, définitivement je le raye de mon esprit.

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  4. Bon … Je l'ai acheté récemment (comme je te le disais sur mon blog), en me disant que je me ferais (un jour …) ma propre opinion à son sujet, car je lis des avis assez divers. Ce n'est pas le tien qui va m'inciter à me précipiter !

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    1. Il ne te reste plus qu'à aller vérifier par toi-même. Je serais d'ailleurs curieux d'avoir ton avis là-dessus.

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  5. Oh oh, je le lirai après mon roman en cours, on verra bien ^^

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    1. Plus on est de fous, plus on rit ! Je lirai ton avis avec plaisir…

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