lundi 1 mars 2021

Maurice Pons - Les saisons

Maurice Pons Les Saisons Christian Bourgois
Maurice Pons 

Les Saisons 

Ed. Christian Bourgois 


Dehors, il pleut. C'est un temps idéal pour aborder le chef d'œuvre de Maurice Pons. Attendez, j'ai employé le terme "chef d’œuvre" ? Je tâche pourtant autant que possible de m'en garder et tape volontiers sur les doigts de ceux qui en abusent, tant son utilisation lui fait perdre son sens. Mais je dois reconnaître que, dans ce cas précis, il est parfaitement adapté. En quoi l'est-il ? Les saisons est-il un roman dont on peut souligner la perfection ? Est-ce le plus abouti ou le plus important de son auteur ? La meilleure représentation de son courant ? Oui. Trois fois oui.

Les saisons se déroule dans une province reculée et isolée dont on ignore le nom. Ses habitants sont ternes, mauvais, sales, se nourrissent exclusivement de lentilles - qu'ils mangent bouillies et boivent distillées - et vivent chichement et tristement au rythme de deux saisons : quarante mois de pluie suivis de quarante mois de glace. La monotonie de leur quotidien et leur absence totale de perspective sont un jour perturbées par l'arrivée d'un étranger, Siméon, un artiste qui a l'ambition d'écrire un livre de sa vie. Mal reçu, il s'attaque tant bien que mal à son projet et tente de faire sa place dans cette communauté aussi haineuse que crasseuse.

Comme je le disais en introduction, le livre de Maurice Pons est un chef d’œuvre de morosité, tant par son humour sinistre que par son ton lugubre, son décor maussade, ses personnages méchants et pitoyables ou encore par la justesse et l'acuité de sa langue ou par sa dimension poétique. Cette fable féroce et amorale, qui semble avoir été écrite avec l'énergie du désespoir, qui parvient à faire du beau avec du moche et dans laquelle l'absurde et la folie côtoient le pessimisme le plus macabre, saura parler au neurasthénique qui sommeille en vous.

6 commentaires:

  1. Est ce qu’on en sort pas trop mal de cette lecture,et si on arrive à ”faire du beau avec du moche” j’achète !
    J’ai lu il y a longtemps Mademoiselle B un thriller assez glaçant.

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    1. Si, il est possible que tu en sortes mal. Mais c'est ce qu'on attend de la très bonne littérature, non ?

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  2. J'accorde beaucoup d'importance à l'utilisation mesurée du terme "chef-d'oeuvre". Mais fiou, ça ne respire pas la joie quand même. J'ai un peu honte de l'avouer, mais je crois que je vais faire l'impasse pour le moment.

    Note anecdotique : ta première phrase m'a fait instantanément penser, va savoir pourquoi, à "Demain il pleut" de Guerilla Poubelle. C'était presque prémonitoire tant le même espoir semble s'échapper des deux.

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    1. Je pense que je n'ai pas utilisé ce terme plus de deux ou trois fois sur ce bog, c'est dire !

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  3. C'est assez fou qu'un roman aussi lugubre parvienne à me donner autant envie avec ta chronique.

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