Antoine Bello
Roman américain
Ed. Gallimard
Une fois n'est pas coutume, la quatrième de couverture est bonne et pose d'emblée la vraie question : combien coûte une vie humaine ? Le roman d'Antoine Bello tente d'y répondre en s'interrogeant sur la pratique du life settlement, la cession d'une police d'assurance-vie en vigueur à un tiers, du vivant de l'assuré, à un prix supérieur à valeur de rachat et à moins que son bénéfice net au décès. En gros, comment se faire de l'argent en pariant sur l'espérance de vie du vendeur ?
Dans ce roman qui fustige la cupidité de Wall Street, l'auteur de Sherbius (et moi) explore les tenants et les aboutissants du capitalisme tout en métaphorisant le rapport ambigu que les américains (entre autre) entretiennent avec celui-ci. Pour cela, il alterne les articles de presse de Vlad Eisenberg (qu'on aura le plaisir de retrouver plus tard dans Du rififi à Wall Street) sur le phénomène du life settlement à Destin Terrace et le journal que tient Daniel G. Siver depuis cette ville de Floride. Puis il lie le tout grâce à une correspondance entre les deux hommes, vieux amis de fac, qui profitent de leurs échanges pour confronter leurs points de vue et surtout réfléchir au mythe du grand roman américain. Bien sûr, l'un et l'autre en ont une conception très différente. Elle doit être journalistique et ancrée dans le réel pour le premier qui ne jure que par Norman Mailer, Tom Wolfe ou Hunter Thompson, elle a une portée plus fictionnelle, romanesque et universelle pour le second.
Si ce n'est pas réellement le sujet du livre, c'est ce débat sur la littérature qui est finalement au cœur du récit. D'autant plus qu'Antoine Bello y ajoute une intrigue secondaire digne des Falsificateurs : dans son journal, partant d'un canular bien innocent - créer de toutes pièces sur la fiche Wikipédia d'Hermann Broch une amitié avec Leo Perutz - Daniel fait part du travail acharné de recherches que lui demande cette modification pour être cohérente et crédible. Et comme, en plus, les deux amis essaient de se coller avec des anagrammes basés sur des noms d'auteurs (jeu tout à fait oulipien auquel je me suis volontiers prêté et qui donne au livre une dimension schizophrénique avec ses diverses interprétations possibles quant à l'existence ou non des deux protagonistes), ce roman solidement documenté sur les avantages et les travers du capitalisme moderne, habilement construit et très érudit, est avant tout un brillant hommage à la littérature et à son pouvoir.
Dans ce roman qui fustige la cupidité de Wall Street, l'auteur de Sherbius (et moi) explore les tenants et les aboutissants du capitalisme tout en métaphorisant le rapport ambigu que les américains (entre autre) entretiennent avec celui-ci. Pour cela, il alterne les articles de presse de Vlad Eisenberg (qu'on aura le plaisir de retrouver plus tard dans Du rififi à Wall Street) sur le phénomène du life settlement à Destin Terrace et le journal que tient Daniel G. Siver depuis cette ville de Floride. Puis il lie le tout grâce à une correspondance entre les deux hommes, vieux amis de fac, qui profitent de leurs échanges pour confronter leurs points de vue et surtout réfléchir au mythe du grand roman américain. Bien sûr, l'un et l'autre en ont une conception très différente. Elle doit être journalistique et ancrée dans le réel pour le premier qui ne jure que par Norman Mailer, Tom Wolfe ou Hunter Thompson, elle a une portée plus fictionnelle, romanesque et universelle pour le second.
Si ce n'est pas réellement le sujet du livre, c'est ce débat sur la littérature qui est finalement au cœur du récit. D'autant plus qu'Antoine Bello y ajoute une intrigue secondaire digne des Falsificateurs : dans son journal, partant d'un canular bien innocent - créer de toutes pièces sur la fiche Wikipédia d'Hermann Broch une amitié avec Leo Perutz - Daniel fait part du travail acharné de recherches que lui demande cette modification pour être cohérente et crédible. Et comme, en plus, les deux amis essaient de se coller avec des anagrammes basés sur des noms d'auteurs (jeu tout à fait oulipien auquel je me suis volontiers prêté et qui donne au livre une dimension schizophrénique avec ses diverses interprétations possibles quant à l'existence ou non des deux protagonistes), ce roman solidement documenté sur les avantages et les travers du capitalisme moderne, habilement construit et très érudit, est avant tout un brillant hommage à la littérature et à son pouvoir.
J'avais beaucoup aimé ses falsificateurs, un peu moins Ada. Mais ici, le sujet me plait moins, je passe donc.
RépondreSupprimerCelui-ci m'a particulièrement plu. Mais pour avoir lu la majorité de ses livres, c'est certainement "Eloge de la pièce manquante" que j'ai préféré jusqu'à présent.
SupprimerÀ ton avis, ça demande un peu de connaissance en "roman américain" pour vraiment l'apprécier ou pas ?
RépondreSupprimerNon. Ses propos sur la littérature américaine restent assez théoriques. Toutefois, pour s'essayer au jeu des anagrammes, c'est mieux d'avoir quelques noms d'auteurs en tête…
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