L'atelier du roman
Numéro 105 - Philip K. Dick
Ed. Buchet-Chastel
Je n’ai pas été complètement convaincu - c’est un euphémisme - par l’essai de David Lapoujade sur l’œuvre de Philip K. Dick. Pour autant, mon envie de creuser ce filon ne s’est en rien érodée. J’ai donc logiquement mis la main sur le numéro de L’atelier du roman daté de juin 2021 et consacré au romancier américain. À son sommaire, surprise, après de nombreux billets thématiques sur l’auteur de Ubik et entre diverses autres critiques, figure un article de Reynald Lahanque sur Solénoïde de Mircea Cărtărescu, sans aucun doute le livre qui aura le plus marqué mon année 2019. C'est par là que j'ai finalement attaqué ce volume, que j'ai ensuite lu dans un ordre décousu.
Ainsi, en plus de l'article sur le romancier roumain dans lequel l'auteur s'interroge sur la manière de qualifier "une œuvre proprement « inqualifiable »", disons qu'on trouve dans ce numéro, mais pas nécessairement dans cet ordre, un intéressant billet de François Taillandier qui nous explique en quoi Les Misérables de Victor Hugo est le roman "le plus universellement populaire de tous les temps", un billet pauvrement factuel de Marion Messina sur la littérature américaine et qui nous prouve malheureusement que l'auteure de Faux Départ n'est pas plus douée pour contribuer à une revue que pour s'essayer à la littérature, ou encore une réflexion sensée et instructive d'Olivier Maillart sur le travestissement au théâtre inspirée de la polémique qui avait ébranlé le monde du spectacle vivant lorsque la représentation des Suppliantes d'Eschyle avait été annulée sous la pression de groupes antiracistes qui plaçaient le dramaturge grec antique "au même niveau qu'un grand propriétaire de champs de coton des États Confédérés" - mon Dieu que cette phrase était longue ! Deux ou trois autres choses encore, dont un article surprenant et pertinent de Yannick Roy sur la mort de sa tante, et, bien entendu, une douzaine de textes sur Philip K. Dick.
Concernant ces derniers, je crains qu'il n'y ait pas grand chose à dire. Non pas que les contributeurs n'aient rien eu à apporter ou d'avis sur la question - non - mais, pour leur défense, les trois pages allouées à chacun d'eux ne permettent pas réellement de se lancer dans un travail conséquent et n'offrent pas non plus la possibilité d'établir de grandes théories. Tous ou presque se contentent donc de revenir sur les éléments classiques : l'incroyable imagination de Philip K. Dick, la faiblesse de son style, sa paranoïa, sa dépression, son mysticisme et sa consommation d'amphétamines. Seul Gérard Klein, probablement, parvient à synthétiser des idées plus vastes et à aborder avec pertinence la question pourtant rabattue de la comparaison entre littérature de genre et littérature générale. L'auteur et éditeur, spécialiste de la science-fiction, en profite pour s'interroger sur "le rapport entre les littératures de l'imaginaire et la nosologie psychiatrique".
Vous l'aurez compris, ce numéro comporte quelques articles intéressants, que ce soit sur l'auteur de Substance Mort ou non, mais ne propose rien de vraiment incontournable sur le sujet. En revanche, et c'est déjà beaucoup, quand une revue de littérature s'intéresse à un romancier comme Philip K. Dick et consacre tout un numéro à de la science-fiction, c'est toujours bon à prendre. De là à penser que la SF est de la vraie littérature, il n'y a qu'un pas.
Et pour faire le point sur ce challenge, c'est ici.
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