Nicolas Chemla
Murnau des ténèbres
Ed. Cherche-Midi
Le 11 mars 1931, F. W. Murnau, réalisateur allemand et grand maître du cinéma expressionniste, se tue dans un accident de la route. Sa mort, survenue quelques jours avant la première de son ultime film, confirme ce que d'aucuns craignaient déjà : son dernier long métrage, "Tabou", est maudit !
Ce film, d'esprit symboliste, met en scène l'histoire d'amour interdite entre Matahi, un pêcheur de perles polynésien, et Reri, une jeune femme désignée pour devenir prêtresse sacrée. Les amants, qui décident de vivre leur passion contre la tradition qui veut que Reri reste vierge, fuient, poursuivis par Hitu, le sorcier qui a choisi le destin de la jeune femme et l'a donc désignée tabou, intouchable.
Le tournage du film est auréolé de légendes. On raconte qu'il s'est déroulé dans des conditions dantesques et qu'il fut ponctué d'accidents, de drames et de catastrophes. La raison ? Hitu, le sorcier du film mais réel chaman de l'île, lui aurait jeté un sort après les sacrilèges et la violation de lieux sacrés commis par le réalisateur et l'équipe technique. Plusieurs personnes auraient été blessés, certains y auraient même laissé la vie, jusqu'à Murnau, sur la route qui le mène à la projection de la première.
Le second roman de Nicolas Chemla nous invite à revivre cette histoire, de l'arrivée du cinéaste à Bora-Bora jusqu'à sa mort à New-York. Il raconte le mythe et partage sa fascination pour Murnau et pour son chef-d’œuvre. Mais surtout, et c'est à mon sens le vrai sujet du livre - c'est du moins ce que j'ai choisi d'en retenir, il revient sur l'influence des îles du Pacifique et des mers du sud sur les artistes : Murnau, forcément puisqu'il a traversé la planète pour venir y réaliser son film, mais également Gauguin, l'un des grands ambassadeurs du postimpressionnisme qui termina sa vie aux îles Marquises, Melville ou Loti, dont les récits sont fortement inspirés de leurs expériences personnelles de marins sous ces latitudes...
Le livre fait la part belle à l'artisanat polynésien, élève la confection des pirogues au rang des beaux arts ou encore développe la philosophie du tatouage traditionnel. Finalement, Nicolas Chemla semble ne pas être moins impressionné par cette culture et ces pratiques ancestrales que les artistes auxquels il rend hommage. Une fois de plus, mais dans un registre diamétralement opposé, il se montre aussi enthousiaste et communicatif pour ce mythe qu'il l'avait été pour le culturisme dans son roman précédent, Monsieur Amérique. Je me demande maintenant, après les sportifs sous stéroïde et après le cinéma muet maudit, vers quel sujet improbable il nous entraînera dans son prochain roman.
je crois que ce n'est pas vraiment pour moi
RépondreSupprimerJe crois pourtant que c'est bon pour tous les lecteurs curieux.
SupprimerJe viens de visionner le film : une belle histoire d'amour contrarié par la religion et l'argent.
RépondreSupprimerIl ne te reste plus qu'à lire le roman !
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